San Perdido, David Zuckermann – Résumé détaillé

22 juin 2019 0 Par Stanislas

 

Ce roman est celui d’une légende, le héros de tout un peuple, de tous ceux que la chance semble avoir oublié, que le désespoir parait avoir envahi. 

Présentation 

En ouvrant ce livre à la couverture colorée et gaie, on s’attend à découvrir l’agitation d’une ville portuaire panaméenne des années 40, les musiciens de rue et les marchés ouverts d’Amérique Centrale. Mais on déchante vite. L’auteur nous plonge dans l’univers répugnant de la décharge de Lagrima, le quartier le plus nauséabond de San Perdido. On y suit une vieille femme, qui règne sur les immondices et dont le regard bienveillant préserve les enfants des dangers des déchets – parmi lesquels ils cherchent toute la journée de quoi manger et améliorer leur quotidien. Felicia est touchante, en s’attachant à elle on s’attache à la vie dans cet enfer, et à l’espoir que quelque chose va changer. 

Yerbo Kwinton 

La décharge fait la jonction entre la ville de San Perdido et la jungle. Il restait à cette époque des lieux que la civilisation n’avait pas encore domestiqué, cette canopée en fait partie. Et c’est de cette jungle qu’arrive sans que Felicia ne s’en rende compte un enfant noir, aux traits fins et au regard bleu clair. C’est sans doute un Cimarron, un Noir vivant dans la jungle. Quelque chose va changer. Il vient s’installer à côté de chez Felicia et son expression tout à fait neutre, son énergie et son silence (on apprend plus tard qu’il est muet) ne manquent pas d’intriguer la vieille femme. Mais ce qui interroge surtout est la puissance des ses mains, énormes, noueuses, habiles. Peu à peu, elle apprivoise l’enfant muet en lui offrant à manger, en échange de quoi il va lui chercher de l’eau à la ville ou lui répare sa modeste cabane. Tous les jours, il récupère de l’acier, du fer, de la tôle dans la décharge et le vend en négociant – toujours en silence, à bon prix. On le surnomme La Langosta (Le Homard) car ses mains sont puissantes et peuvent plier l’acier. Il fait fuir les chiens errants, taire les singes et les crapauds, fuir les oiseaux qui rodent. 

 

Le lecteur apprend le nom de cet intriguant personnage en même temps que Felicia, en lisant le nom inscrit sur un livre qu’il lisait dans la cabane qu’il avait aménagée dans la décharge : Yerbo. 

En grandissant, il ne se confie pas davantage, mais sa renommée grandit et quelques meurtres par étouffement suggèrent que le jeune adolescent punit sévèrement les injustices. 

Les années passent et un beau jour, Felicia se rend compte que Yerbo a quitté la décharge : sa cabane est vide, propre et rangée. Sans doute a-t-il gagné assez d’argent pour se rendre à la ville, où il travaille comme docker, chargeant et déchargeant tous les jours des caisses qui arrivent en provenance du monde entier. 

 

La fresque panaméenne 

Le roman se sépare, on perd de vue un moment Yerbo pour découvrir une multitude d’autres personnages. Entre deux descriptions de ces personnages donnant un bon aperçu de la société panaméenne de l’époque, on retourne un moment à la vie de Yerbo, pour être témoin de son évolution. 

On découvre ainsi la vie difficile des prostituées dans les villes portuaires à la travers la très jeune et très belle Hissa, qu’une maquerelle sans scrupules vend à des marins pour une nuit puis définitivement à une certaine Madame, qui tient une maison close. La vie auprès de Madame semble lui être moins pensante et elle a davantage de libertés. 

On découvre aussi Augusto, un jeune homme de Lagrima qui à force de courage et de volonté est employé parfois comme docker, parfois comme ouvrier sur des chantiers. 

 

San Perdido est dirigée par un gouverneur. Si jusqu’alors on a suivi les habitants des quartiers les plus pauvres, il est temps de s’intéresser aux âmes qui peuplent les hauteurs de la ville, dont les villas orgueilleuses et claires sont autant d’affronts lancés à qui lève les yeux. Justement, les quelques personnages qui vivent dans les hauteurs et notamment dans le palais du gouverneur semble dénués d’âme. Dirigés par leurs passions – la caricature n’est jamais loin dans ce roman à visée sociale, les édiles de la ville ne sont pas portées dans le cœur de l’auteur : le gouverneur Lamberto, dont l’auteur nous glisse à l’oreille qu’il aurait assassiné son prédécesseur pour accéder au pouvoir, est surnommé le Taureau tant son appétit sexuel déborde : célibataire, il honore plusieurs fois par jour différentes femmes plus ou moins délaissées par leur mari, habitantes des villas riches et propres. 

Le docteur Portillo-Lopez fait justement la jonction entre les bas-quartiers et la ville haute : venu pour remplacer le médecin du palais, il soigne une infection sexuelle du gouverneur qu’il a transmis à toutes les femmes qu’il a honoré entre deux réunions : c’est toute la ville haute qu’il doit visiter pour donner de la pénicilline et rassurer les patientes sur leurs symptômes. 

 

La jeune Yumna participe aussi à cette jonction : jeune fille de Lagrima, elle a grandi dans la décharge. Sa beauté attire tant le gouverneur qu’il en fait sa maîtresse. Entre amour et intérêt, jalousie et violence, Yumna est instable et cette instabilité va être utilisée par les ennemis du gouverneur… 

Le conseiller du gouverneur profite des appétits de son supérieur – qui n’a pas la tête aux affaires, pour prendre les rênes du pouvoir, étendant son réseau et son contrôle sur la ville chaque jour. Lisse et sec d’apparence, Carlos Hierra un vrai conspirateur qui se cache dans cette être machiavélique rongé par l’ambition et la rancune. 

La figure du truand est incarnée par un américain nommé Stomper : un homme un peu grassouillet, dont le visage simplet cache une intelligence cupide. Il a sous ses ordres d’anciens soldats de l’armée américaine, qu’il embauche pour ses basses besognes. Stomper rencontre Hierra et ensemble ils montent une sombre opération lucrative dont on ne sait pas beaucoup plus, matant une manifestation des dockers. 

Le héros 

Le roman se divise en deux histoires, comme la ville de San Perdido : celle des bas-quartiers et celle des cimes. 

Ces deux histoires se rencontrent, se séparent, sans jamais perdre le lecteur, mais faisant monter en lui une impression que quelque chose va se passer, et que le jeune Cimarron, suivi de loin par un mystérieux Rafat, va être lié à ce changement. Tous les ingrédients sont réunis. 

               Yerbo est prêt à rentrer dans l’histoire.